L’esprit de cordée

La nuit est tombée depuis longtemps. Le bivouac est installé au milieu d’un champ enneigé à 1 800 mètres d’altitude. Les soldats s'activent avant la phase de tir de demain. Dans le froid mordant et l’obscurité animée par les lampes-frontales, les chasseurs alpins perçoivent leurs munitions.

Le capitaine François, commandant le sous-groupement tactique interarmes “Jonquille” fait un dernier brief avec ses chefs de section : « Demain les conditions seront dures, veillez absolument sur tous vos hommes, que le froid ne les empêche pas de mener à bien leur mission ».

Il a neigé cette nuit. Pas de quoi décontenancer les chasseurs alpins qui sortent de leurs tentes au petit matin au bruit des réchauds.

Début de l’infiltration vers le pas de tir. Les hommes de la section appui (SAPP) sont lourdement chargés, mais avancent sans faiblir vers le point “Papa 4” conformément aux ordres.

La SAPP compte dans ses rangs une équipe de tireurs d’élite. Le tireur porte son arme, un PGM Hécate II, pesant à lui seul 16 kilos. Au total, il porte près de 45 kilos (armes, munitions, équipement) et s’infiltre sur un point haut pour observer et déceler l’ennemi, tout en guidant les tirs d’artillerie.

L’infiltration jusqu’à “Papa4” est terminée. Les tireurs se mettent en place et prennent en compte leurs secteurs de surveillance. Le tireur d’élite et son spotter s’occupent des cibles entre 800 et 1 200 mètres.

L’ennemi ne s’est pas encore montré, mais un autre danger guette les chasseurs alpins : une tempête commence à se lever. Immédiatement, certains se mettent à creuser la neige pour se protéger des rafales glaciales. Des mesures indispensables pour pouvoir durer en montagne.

Pendant que certains creusent, d’autres continuent de scruter le moindre mouvement ennemi. Les chefs de groupe veillent aux côtés de leurs hommes.

L’ennemi est enfin détecté. Au milieu des rafales de vent glacial résonnent les rafales des mitrailleuses. Au bout de 15 minutes de feu, l’ennemi est anéanti, un repli stratégique est demandé à la radio. Direction le point “ZA1” pour rejoindre “Mike Oscar”.

Le thermomètre indique -15°C. Alors que les tireurs d’élite sont restés sur un point haut pour observer les tirs, le reste de la section a rejoint la position de “Mike Oscar”, le groupe mortiers. En retrait, ils n’ont pas encore tiré et luttent contre le froid. Ici, tous s’entraident, peu importe le grade, pour que personne ne faiblisse. Ceux qui ne participent pas directement à l’action préparent des boissons chaudes pour les autres. Chez les Alpins, on appelle cela “l’esprit de cordée”.

L’ordre est donné aux mortiers de 80 mm de tirer. Ils ont une cinquantaine d’obus à tirer pour réduire l’ennemi avant le retour de la tempête.

Après une journée postés pour guider les tirs au milieu de la tempête, les tireurs d’élite descendent au point “ZA1”. Le reste de la section les recueille et rompt le contact.