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Le corps expéditionnaire français se prépare à la campagne d'Italie de 1943

Texte : LCL (R) Christophe GUE de la Chaire de tactique générale et d'histoire militaire

Publié le : 13/05/2023.

Mai 1944. Débouchant par surprise de la tête de pont du Garigliano, le corps expéditionnaire français en Italie rompt la ligne Gustav. Débordées les forces allemandes se replient. La route de Rome est ouverte. Point d’orgue de la campagne d’Italie, l’offensive du Garigliano est sans doute la plus belle manœuvre française de la guerre. Mais une telle campagne n’aurait pas été possible sans la préparation opérationnelle qui l’a précédée.

La préparation de la campagne d’Italie remonte à l’automne 1940, avec les mesures prises pour disposer des effectifs nécessaires à la reprise de la lutte le moment venu. Cependant les moyens manquent et il faut attendre le débarquement allié du 8 novembre 1942, au Maroc et en Algérie, pour qu’une véritable préparation opérationnelle démarre.

Impressionnés par la participation active de l’armée française à la campagne de Tunisie, les Américains acceptent d’équiper 11 divisions lors de la conférence d’Anfa de janvier 1943. En mars, il est décidé que 9 d’entre-elles formeront le ʺcorps expéditionnaire françaisʺ, qui est alors placé sous les ordres du général Juin.

Le programme débute par la constitution d’un premier corps de débarquement à trois divisions d’infanterie (DI) et une division blindée (DB), formées selon le modèle américain. L’instruction tactique est laissée à l’encadrement français. L’instruction technique est en revanche à la charge de la French Training Section américaine, qui forme les Français à l’utilisation du matériel, à la conduite, au tir, au débarquement sur les plages et à l’attaque des blockhaus.

La motivation dont font preuve les Français encourage les Américains à poursuivre leur équipement et à prévoir l’intervention d’un corps français à deux divisions en Italie pour la fin 1943.

Offensive française

Fixé sur les intentions alliées, Juin prend les mesures qui s’imposent pour que les forces françaises remplissent au mieux leur mission. Constatant que les unités motorisées et blindées alliées ont du mal à opérer dans le terrain accidenté de la péninsule, il décide de retirer la division blindée du corps de débarquement et demande qu’elle soit remplacée par la 4e division de montagne marocaine (DMM).

Celle-ci étant momentanément indisponible du fait du débarquement en Corse (8 septembre 1943) , Juin opte pour l’utilisation de deux divisions d’infanterie nord-africaines, la 2e DIM et la 3e DIA, renforcées par des compagnies muletières et des groupes de tabors marocains qui excellent dans le combat en montagne.

Le corps expéditionnaire français en Italie (CEFI) est né. Initialement placés en soutien d’une division d’infanterie américaine, les Français la relèvent puis prennent à leur compte un créneau du front. En janvier 1944, chargés de couvrir une attaque visant à conquérir le mont Cassin, ils s’emparent de leur objectif, le Belvédère.

Fort de ce succès, Juin obtient le renforcement du CEFI avec la 4e DMM et la 1re DMI. Il parvient également à convaincre les Alliés de la nécessité de modifier leur plan d’opérations en y incluant une offensive française à travers les monts Aurunci, au sud de la vallée du Liri.

Juin s’appuie sur les enseignements précis tirés de la campagne d’hiver pour préparer celle du printemps. Les états-majors du CEFI ont en effet été frappés par la capacité des troupes allemandes à se replier sur des positions préparées à l’avance. Ils en ont conclu qu’il était indispensable de mener des actions rapides, sans relèves ni dépassement, pour prendre l’ennemi de vitesse. Ces enseignements sont largement pris en compte.

Résultats payants

Pour se familiariser avec le nouveau front du CEFI, tenu par la 4e DMM, elles y effectuent des séjours en toute discrétion, afin de ne pas éveiller la méfiance de l’ennemi. Les résultats sont payants. Les capacités développées par le CEFI lui permettent d’attaquer en utilisant l’ensemble de ses moyens sur toute la largeur de sa zone d’action.

Progressant par les hauts aussi bien que par les bas, les unités françaises submergent des forces allemandes trop habituées à un ennemi agissant de manière processionnelle le long des principaux axes.

Prises de vitesse, elles ne peuvent pas se rétablir et leurs compte rendus soulignent la redoutable capacité d’adaptation des Français. La préparation opérationnelle du CEFI représente une œuvre de longue haleine : neuf mois d’efforts soutenus ont précédé huit mois de campagne pendant lesquels elle reprend en vue de l’offensive du Garigliano.

Le crédit que retire la France du succès remporté en Italie permet une participation massive de ses forces armées au débarquement de Provence et aux campagnes de France et d’Allemagne. Elle contribue ainsi largement à sa présence à la table des vainqueurs en mai 1945.

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