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Comment le sport s'est imposé dans l'armée ?

Texte : Michel Merckel

Publié le : 15/06/2023.

La guerre n’est pas le sport, mais la force physique et mentale constitue un élément déterminant et commun de ces grands phénomènes. Pour l’acquérir, la renforcer et l’entretenir, cela nécessite de la part du soldat ou du sportif, un entraînement spécifique. Si aujourd’hui le sport est totalement intégré dans la formation des militaires, cela n’a pas toujours été le cas.

Le 10 décembre 1848, Louis Napoléon Bonaparte devient le premier président de la République. S’il comprend l’intérêt de la gymnastique pour la préparation physique du soldat, il constate l’absence de structures et de cadres. Le 15 juillet 1852, il inaugure l’École normale militaire de gymnastique de Joinville. Elle est la première école de formation créée en France et s’appuie sur la méthode de Francisco Amoros qui associe mouvements de gymnastique de base et exercices aux agrès.

La défaite de 1870 montre les limites de cette méthode : l’une des raisons de la défaite est due au mauvais état physique de l’ensemble des troupes françaises. Des réformes importantes s’imposent.L’armée se doit de disposer de militaires en bonne forme pour prendre sa revanche sur la Prusse. Afin de répondre à cette volonté, plusieurs méthodes d’éducation physique vont naître. C’est dans ce contexte que l’enseigne de vaisseau Georges Hébert révolutionne les usages en privilégiant les rapports avec la nature et le grand air.

Sa méthode dite "naturelle", dont la devise « être fort pour être utile », est bien plus attrayante que les autres. Rapidement adoptée par le monde militaire, elle est l’origine du parcours du combattant. Mais il s’agit d’éducation physique. Le sport, une activité de compétition avec ses règles et ses classements, est à cette époque pratiqué par 1% de la population. Il est considéré comme un simple divertissement un peu méprisé et sans grand intérêt.

L’influence de la Grande Guerre

Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France se trouvant engagée dans une guerre de mouvement. Après la première victoire de la Marne, l’armée allemande opère un repli défensif. La "Course à la mer" est engagée et les tranchées se creusent de part et d’autre. La guerre de position commence, les "Pantalons Garance" deviennent les Poilus. En dehors des périodes de combat, loin de leur famille, de leur travail, de leur village, les soldats s’ennuient.

Henri Barbusse écrit dans Le feu : « On est devenu des machines à attendre. » Pour gérer ces longs moments chargés d’angoisse et de cafard, les Poilus vont se mettre à pratiquer spontanément du sport. Devant l’engouement que suscite ce type d’activité, certains officiers proposent, à la place de la gymnastique militaire, cette autre forme d'effort.

Dès lors, des comptes rendus apparaissent dans les journaux de tranchées décrivant un foisonnement et une diversité d’activités sportives. Durant les 1 561 jours du conflit, cette pratique va évoluer et grandir grâce à l’influence de nos alliés et à la réactivité de l’institution militaire, qui, dans sa directive 1080 du 3 juin 1917, l’encourage. La dynamique est lancée.

Trouver une réponse pertinente

Dès l’Armistice du 11 Novembre 1918, les stades et les terrains de sport remplacent les champs de bataille. Le choix est fait par l’ensemble des états-majors d’utiliser le sport pour gérer les longs mois que dure la démobilisation. Ponctuée de nombreuses rencontres internationales, cette période sera l’une des plus sportives que la France ait connue. En conséquence, les Jeux interalliés disputés du 22 juin au 6 juillet 1919, la création de nombreuses fédérations dès 1919 et la relance des Jeux Olympiques en 1920, inscrivent définitivement le sport dans le paysage français.

Aujourd’hui, enseigné au sein des forces armées, le sport construit physiquement et mentalement les soldats grâce aux valeurs que sont le travail, le respect, l’engagement réfléchi, le dépassement de soi et l’esprit de groupe. Nous sommes loin des méthodes d’Amoros ou d’Herbert, certes conçues pour exercer l’esprit et le corps, mais qui, dans les faits, étaient des moyens de soumettre les soldats à une stricte obéissance. Un sportif se doit d’être réfléchi pour analyser rapidement une situation et trouver une réponse pertinente sous peine de défaite.

Un soldat aura la même attitude pendant les combats, mais c’est sa vie et celles de ses frères d’armes qui sont en jeu. Ancien militaire, cité au combat et plusieurs fois décoré, Yann dirige aujourd’hui une unité de recherche dans le civil. Il affirme : « C’est à l’armée que j’ai appris et eu la possibilité de prendre le plus d’initiatives ». C’est le grand apport du sport à l’armée française.

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