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Coëtquidan, une terre de savoirs

Texte : Lieutenant-colonel Pierre Garnier de Labareyre - Conservateur du musée de l’Officier

Publié le : 12/03/2025. | pictogramme timer Temps de lecture : 3 minutes

Saint-Cyr fête cette année ses 80 ans d’installation sur le camp de Coëtquidan en Bretagne. Quatre-vingts ans marqués par une adaptation continue de la formation pour forger aujourd’hui les chefs de demain. Une académie militaire unique pour une armée soudée.

En juillet 1944, les bombardements alliés détruisent les bâtiments de l’École spéciale militaire (ESM) implantée à Saint-Cyr-l’École, près de Paris. Le général de Lattre de Tassigny décide en juin 1945, après l’étude de plusieurs garnisons -Chartres, Fontainebleau, Grosbois et Reims-, d’ouvrir une école unique de formation des officiers dans le Morbihan, sur le camp de Coëtquidan

Ce dernier offre des capacités de manœuvre adaptées au combat mécanisé. Ce choix s’explique par la nécessité de redonner une cohésion à un corps d’officiers issus de parcours divers : Résistance, France libre, armée d’Afrique, etc. Ainsi, dans une volonté d’amalgame, la formation des officiers réunit plus de 3 000 élèves aux origines variées. Le général Schlesser est chargé de monter la formation en puissance.

L’ESM et l’École militaire interarmes (EMIA) sont ainsi regroupées en 1947 en une seule École spéciale militaire interarmes (ESMIA), délivrant une scolarité allongée : deux ans pour les recrutements directs (ESM) et un an pour les semi-directs (EMIA). La formation académique se développe notamment dans les matières scientifiques, mais rapidement l’objectif est bien de préparer les jeunes officiers au combat interarmes des guerres d’Indochine et d’Algérie.

Insérer dans la société

La décision est prise au début des années 60 de séparer les recrutements directs et semi-directs en distinguant à nouveau les deux écoles. Leur implantation commune est confirmée à Coëtquidan. Une infrastructure plus adaptée est construite. Cette ʺnouvelle écoleʺ se structure autour de trois pôles : le commandement (bâtiment PC), l’enseignement (salles d’instruction) et la vie des élèves (logements collectifs et individuels). 

Dans les années qui suivent, la formation intègre davantage d’enseignements académiques pour former l’esprit et le jugement des élèves tout en les ouvrant aux évolutions techniques et à la compréhension du monde moderne. Une nouvelle école, l’École militaire du corps technique et administratif, est créée en 1977 pour pourvoir aux emplois administratifs de l’armée de Terre. Elle sera fermée en 2008.

Dans les années 80, une réforme globale est entreprise pour conférer aux élèves-officiers un diplôme universitaire et titre d’ingénieur. Les scolarités sont allongées d'un an. L’intention est de mieux insérer l’officier dans la société en érigeant son école de formation initiale au rang de Grande École d’enseignement supérieur. 

En 1983, les écoles accueillent leurs premiers éléments féminins. Le début des années 2000 marque une ʺrefondation de l’armée de Terreʺ et le passage à l’armée de métier qui nécessite la création d’un nouveau type de formation pour les officiers sous contrat, assuré par le 4e bataillon de Saint-Cyr qui jusqu'alors formait les élèves-officiers de réserve. 

Une singularité française

L’adoption du ʺprocessus de Bologneʺ, en 2003, offre la reconnaissance internationale des diplômes délivrés et favorise une ouverture vers l’extérieur, concrétisée par des échanges de plus en plus nombreux avec d’autres grandes écoles ou académies militaires étrangères. Ceci n'empêche pas de maintenir une formation militaire et humaine exigeante. Perdant le recrutement ORSA, l’EMIA ouvre son recrutement aux militaires du rang, en plus des sous-officiers. 

Un centre de recherche (CReC) est fondé, unique dans l’armée de Terre, réunissant plus de 70 enseignants-chercheurs. En 2021, les officiers sous contrat encadrement, spécialistes et pilotes sont regroupés au sein de l’École militaire des aspirants de Coëtquidan (EMAC) créée dans une volonté de renforcer leur formation et leur identité. L’Académie militaire compte aujourd’hui trois écoles (ESM, EMIA et EMAC) qui correspondent chacune à une voie de recrutement spécifique (concours, interne, sous contrat). 

Elle perfectionne un modèle éprouvé de formation intégrée entre formation humaine, académique et militaire, dans une unité de temps et de lieu - une singularité française. Elle renforce les forces morales pour vaincre, tout en poussant à la réflexion stratégique comme à l’esprit pionnier, à travers le CReC et les projets de recherche, et en formant aux technologies cyber, drones, intelligence artificielle, etc. 

 

Le saviez-vous ?

Le ʺprocessus de Bologneʺ est un processus de rapprochement des études supérieures européennes amorcé en 1998.

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