Un Noël en vert et rouge

« Noël à la Légion, c’est sacré. Cela fait plus de dix-huit ans que je le célèbre avec mes camarades. La Légion étrangère rassemble des militaires venus de tous les horizons. Certains n’ont pas la chance de rejoindre leurs proches pour les festivités de fin d’année. Pour ne pas qu’ils restent seuls au quartier, nous restons tous ensemble en “famille”. Qu’importe la religion de chacun. Le 25 décembre reste un moment de fraternité et de solidarité. Du soldat au chef de corps, pas d’exception. Chacun prend part à cette tradition immuable.

Ma femme et mes deux enfants, âgés de cinq et huit ans, ont l’habitude de mon absence la nuit du réveillon. On s’organise donc autrement en partageant le repas et en ouvrant des cadeaux sous le sapin, le lendemain. Cette année, ce jour de fête se déroulera sous la chaleur moite de la Guyane et non pas sous la neige. Je suis en séjour pour trois ans au sein de la 2e compagnie du 3e régiment étranger d’infanterie. Comme tous les ans, dès le début du mois de décembre, les compagnies s’attèlent aux préparatifs avec beaucoup d’implication. Chacune désigne des équipes pour organiser deux activités principales.

Un esprit intact

La première est l’élaboration d’une crèche grandeur nature, le plus souvent sur un thème imposé.Des costumes aux décors, la créativité et l’ingéniosité dont font preuve les légionnaires donnent de véritables chefs-d’oeuvre. La compétition est rude entre les unités,puisqu’une seule de ces fresques vivantes sera mise à l’honneur, à l’issue d’un vote. Le régiment ouvre même ses portes aux familles pour qu’elles puissent venir les admirer.Viennent ensuite les sketchs. Les plus jeunes mettent en scène des moments de vie qu’ils ont consignés dans un cahier tout au long de l’année. Du chef de groupe au commandant d’unité, personne n’est à l’abri d’une imitation. Ces parodies “bon enfant “ sont jouées devant l’ensemble des sections. Fous rires garantis.

Quant au repas, c’est à chaque fois un véritable festin. À chaque étape du menu,le chef de corps se mêle à une compagnie jusqu’à la remise des cadeaux. Je constate après toutes ces années que l’esprit de cette tradition est resté intact. Le premier Noël à la Légion suscite souvent de l’incompréhension chez les plus jeunes. Un sentiment vite dissipé grâce à l’accompagnement et à la pédagogie des plus anciens.Qu’importe l’endroit et les moyens,en opération ou ailleurs, nous trouvons toujours un moyen de le célébrer : l’important c’est d’être entre frères d’armes, “en famille”. »